20/03/2025 10:51

Retraites: après le départ de la CGT, le "conclave" en sursis

Le Premier ministre François Bayrou lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 19 mars 2025

Stop ou encore ? Largement ébranlé par les départs de certains acteurs, les menaces des autres et les déclarations du Premier ministre qui enterrent l'hypothèse d'un retour à 62 ans, le "conclave" sur les retraites censé améliorer la réforme de 2023, se réunit à nouveau jeudi, dans le flou.

Jeudis 20 et 27 mars, les organisations syndicales et patronales doivent discuter d'"usure professionnelle et pénibilité", deux sujets auxquels les syndicats sont particulièrement attachés.

Mais "avec les (derniers) rebondissements, j'ai bien peur qu'il y ait du changement", indique à l'AFP Pascale Coton, négociatrice pour la CFTC.

"Il faut que les partenaires sociaux soient clairs entre eux", insiste Cyril Chabanier, leader de la CFTC, qui compte demander aux autres partenaires : "Est-ce qu'on veut avancer ? Est-ce que chacun est prêt à faire des concessions ?"

"Au bout d'un moment, soit ils nous disent +oui+ et on avance, soit ils nous disent +non+ et on arrête le +conclave+. Moi je n'ai pas trois mois à perdre", s'agace-t-il, menaçant ainsi d'emboîter le pas à la CGT, dont la leader, Sophie Binet, a claqué la porte des négociations mercredi.

"Le Premier ministre et le patronat ont malheureusement définitivement enterré ce conclave. Et c'est très grave parce que le Premier ministre s'était engagé à ce que ces discussions soient +sans totem, ni tabou+", a justifié la patronne de la CGT sur France 2.

"Je pense qu'un accord est possible", a positivé le ministre de l'Economie Eric Lombard jeudi sur TF1. "Les organisations qui se sont éloignées pourront revenir à la table si cet accord leur convient", a-t-il ajouté.

Ce sont les dernières déclarations du Premier ministre, dimanche et réitérées cette semaine au Parlement, jugeant "impossible" un retour de l'âge de départ en retraite à 62 ans, qui ont fait exploser la fragile architecture des négociations.

La secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT) Sophie Binet lors d'une manifestation des salariés de Renault-Stellantis à Paris, le 4 février 2025

"J'ai simplement rappelé qu'il fallait se fixer comme objectif le retour à l'équilibre (du système de retraites) en 2030" et jugé "qu'à mes yeux, on ne pouvait pas revenir à 62, supprimer la réforme des retraites et retrouver l'équilibre financier", a plaidé en vain le Premier ministre mercredi devant les sénateurs.

- Du plomb dans l'aile -

"Les 62 ans, c'est la question centrale", a répliqué Sophie Binet.

Selon un sondage Elabe pour BFMTV publié mercredi, 50% des personnes sondées souhaitent que, dans les prochaines semaines, une motion de censure soit adoptée contre le gouvernement de François Bayrou sur le sujet des retraites. Et elles sont 56% à souhaiter revenir à 62 ans - contre 62% en janvier.

"Nous, on veut discuter de l'âge de départ. C'est le cœur du réacteur. C'est la raison pour laquelle on s'est mobilisés et pour laquelle on a souhaité reprendre le fil des discussions", avait rappelé mercredi Marylise Léon, N°1 de la CFDT.

Dans ces conditions, la responsable du premier syndicat français a précisé que son organisation restait dans les négociations mais "s'affranchit" désormais "de la lettre de cadrage" du gouvernement, appelant à "un autre" conclave.

Le secrétaire général de Force ouvrière (FO) Frédéric Souillot (c) à l'hôtel Matignon, le 9 janvier 2025 à Paris

Reste que les concertations sur les retraites, engagées fin février entre partenaires sociaux et prévues pour trois mois, ont plus que jamais du plomb dans l'aile.

Force ouvrière, troisième organisation syndicale, a claqué la porte des négociations dès la première réunion le 27 février, en dénonçant une "mascarade" après l'exigence de François Bayrou de rétablir l'équilibre financier du système de retraites en 2030.

Côté patronal, la plus petite des trois organisations, l'U2P (artisans, commerçants et professions libérales) a aussi quitté le "conclave" mardi estimant que l'équilibre du régime des retraites "imposera de repousser l'âge légal de départ au-delà de 64 ans", sauf pour les métiers difficiles.

Le Medef, première organisation patronale, a dit mercredi par la voix de son président Patrick Martin vouloir "laisser sa chance" à la discussion estimant toutefois que "tous les partenaires sociaux, les politiques a fortiori, doivent prendre en compte cette situation des finances publiques qui devient critique".

© 2025 AFP-Paris (AFP)

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