13/05/2025 18:25

ArcelorMittal: les salariés à Paris, pour du métal, avec ou "sans Mittal"

Des salariés d'ArcelorMittal rassemblés devant le siège du groupe à Saint-Denis, près de Paris, le 13 mai 2025

Plusieurs centaines de salariés d'ArcelorMittal ont manifesté mardi devant le siège français du groupe sidérurgiste pour défendre leur emploi et l'avenir de l'acier en France, mettant la pression sur la direction qui envisage la suppression de plus de 600 postes dans le pays.

Devant le siège social à Saint-Denis en banlieue parisienne, où se tenait un CSE central, puis à l'Assemblée nationale, ainsi qu'à Luxembourg où se tenait le comité d'entreprise européen du groupe, plusieurs représentants syndicaux ont décrit une désindustrialisation à bas bruit du groupe, auxquels ils reprochent un manque d'investissements dans ses outils de production.

Alors que le numéro deux mondial de l'acier envisage de supprimer 1.400 postes en Europe, dans les fonctions support, le comité d'entreprise européen du groupe a assuré n'avoir "aucune information" de la direction "sur le coût total de ce projet" et a déploré l'absence "d'analyse sérieuse des risques inhérents à la délocalisation de ces services" pour la production.

Pour l'instance européenne, "ce processus de délocalisation n'est que la première étape".

Afin d'y remédier, au moins pour la France, l'hypohtèse d'une "nationalisation" était sur toutes les lèvres dans le rassemblement à Saint-Denis.

- Proposition de loi -

Des salariés d'ArcelorMittal rassemblés devant le siège du groupe à Saint-Denis, près de Paris, le 13 mai 2025

"Les Italiens l'ont fait, les Anglais l'ont fait (...) alors pourquoi nous, Français, on n'est pas capable de le faire?", s'est interrogé Gaétan Lecocq, de la CGT d'ArcelorMittal Dunkerque, site le plus menacé par les suppressions de postes, après être monté à la tribune où il a défendu une prise de contrôle des hauts fourneaux français par l'Etat.

Devant lui, des salariés acquis à cette option, clamant : "Du métal sans Mittal !".

"On est venu manifester notre mécontentement, on ne comprend pas les 600 licenciements", a déclaré Francis Carru, de Dunkerque, devant l'entrée du siège français du sidérurgiste qui avait des airs de forteresse, avec des dizaines de CRS devant l'entrée. Il craint "pour (son) emploi et les emplois futurs", redoutant "une fermeture de site" pure et simple.

"ArcelorMittal est en train, clairement, d'organiser la délocalisation de la production depuis des années, et là, on est face à une urgence, c'est vraiment une question de semaines", a ajouté la députée LFI de Seine-Saint-Denis Aurélie Trouvé, qui a déposé mardi matin une proposition de loi de nationalisation, démarche également portée par le PCF et le PS.

"La nationalisation n'est pas une réponse en soi aux difficultés de la sidérurgie européenne", a rétorqué la ministre délégué chargée des PME, Véronique Louwagie, quelques heures plus tard, lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, estimant que la réponse se ferait à l'échelle européenne.

- "Vaches à lait" -

"Arcelor Mittal considère ses actifs en Europe comme des vaches à lait", a estimé pour sa part Jean-Marc Vecrin, représentant national CFDT, devant une commission d'enquête sur les licenciements dans l'industrie à l'Assemblée. Il a dénoncé une "désindustrialisation silencieuse", reprochant au groupe de "réduire à peau de chagrin les investissements de maintien de l'outil" industriel tout en percevant des aides publiques.

Eric Coquerel, député LFI de Seine-Saint-Denis, s'est joint au rassemblement des salariés d'ArcelorMittal devant le siège du groupe à Saint-Denis, le 13 mai 2025

Au coeur du maintien d'une industrie sidérurgique en France, la poursuite ou non des projets de décarbonation du groupe. Fin 2024, ArcelorMittal a suspendu sa décision finale d'investissement - à hauteur de 1,8 milliard d'euros dont plus de 800 millions d'aide promise par l'Etat - pour électrifier les hauts fourneaux de Dunkerque, en arguant de la non compétitivité de l'acier produit en Europe.

Après de meilleurs résultats que prévu au premier trimestre, ArcelorMittal a fait pression sur la Commission européenne, demandant une application "rapide" du plan européen pour l'acier pour regagner en compétitivité, avant d'annoncer s'il investit ou non.

"Le plan de décarbonation d’ArcelorMittal est loin d'être réalisé et a du plomb dans l'aile parce que le groupe met des conditions au niveau européen, sans aucune assurance que ces décisions soient prises", a indiqué Eric Cocquerel, député LFI et président de la commission des finances de l'Assemblée, lors d'un point presse.

Il a évalué à "environ 800 millions d'euros" au minimum les aides perçues par ArcelorMittal depuis 2020.

"L'État attend (...) qu'Arcelor apporte des réponses sur sa stratégie à moyen terme en France et sur la confirmation de ses projets", a déclaré Mme Louwagie.

Le président d'ArcelorMittal France Alain le Grix de la Salle est attendu devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale le 20 mai prochain.

© 2025 AFP-Paris (AFP)

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